Chatbot et design conversationnel – 5 questions à Julien Roquillet
Le phénomène chatbot a entraîné une toute nouvelle manière de concevoir les expériences utilisateur et les interactions entre l’Homme et la « machine ».
Publié le
Par La Redaction
Ces interfaces conversationnelles permettent aux marques d’aller plus loin dans la personnalisation de service, et offrent une belle opportunité d’explorer de nouvelles façons de concevoir les parcours clients. Certes, les algorithmes informatiques restent le cœur artificiel des chatbots ; cependant, c’est à l’aide du design conversationnel que l’on traduit sa stratégie digitale en outil de service concret. Comment penser l’UX design de son chatbot ? Julien Roquillet de la Fab Design de SNCF vous partage son point de vue d’expert.
Pourquoi observe-t-on un tel engouement autour du chatbot et du design conversationnel aujourd’hui ?
Julien Roquillet : Globalement, la communication par présentiel ou appel téléphonique diminue au profit des services de messagerie. Les paradigmes dans nos modes d’interaction ont changé, ils sont passés progressivement du verbal à l’écrit. Pour les marques, c’est toujours intéressant d’échanger davantage avec leurs clients : plus elles sont proches des utilisateurs, plus ces derniers sont enclins à réutiliser les services proposés.
Les chatbots permettent de qualifier les problèmes rencontrés, de proposer des solutions adaptées, ou bien de renvoyer à l’humain. Une phase de conception UX importante est nécessaire dans la création des chatbots, pour identifier et prendre en compte l’ensemble des attentes possibles de l’utilisateur ; cela passe par exemple par la conception du « arbre décisionnel », structure modélisant un ensemble de choix sous la forme graphique d’un arbre.
Depuis l’arrivée de la vague du conversationnel, avez-vous senti des réels changements dans la façon dont on conçoit les interfaces ?
J.R : Nous produisons un « persona » avant de créer une interface, c’est-à-dire des modèles de clients types : c’est un processus d’identification des profils et besoins. Sur les interfaces comme des sites Web ou applis mobile, nous avons des personas plus ou moins généralistes, tandis que les chatbots nécessitent des arbres décisionnels plus complets et précis. Autrement dit, il faut prévoir tous les cas de « question-réponse » susceptibles de se produire lors des interactions entre le bot et ses utilisateurs, et donc, en personnaliser le design.
Quels profils et compétences sont requis pour créer la parfaite interface conversationnelle ?
J.R : Plusieurs types de profils sont indispensables dans la conception d’interfaces conversationnelles : UX designer, direction artistique, ingénieurs informatiques… Mais qu’importe leur profil, tous travaillent en collaboration étroite avec l’équipe métier qui les a mandatés.
Aujourd’hui, pas mal d’agences et de startups proposent des solutions « scalables » (produit capables de s’adapter à un changement d’ordre de grandeur de la demande) et « clé en main » ; par exemple, la startup Destygo est spécialiste des chatbots liés à la mobilité. Ces petites structures disposent d’une valeur ajoutée importante sur l’aspect technique.
Quelle est selon vous la « recette miracle » d’une interaction fluide entre un chatbot et son utilisateur ?
J.R : Il existe deux types de solutions autour du chatbot. On en retrouve certains qui posent des questions et orientent l’utilisateur dans un arbre décisionnel, et d’autres qui « comprennent » l’utilisateur et apprennent de lui au fur et à mesure des données collectées pendant les conversations. Pour fluidifier le dialogue et faire agir le chatbot comme nous le ferons entre êtres humains, il est idéal de combiner les deux solutions.
Quelles sont les limites des chatbots ?
J.R : Nous connaissons l’exemple de Microsoft Tay. En l’espace d’une journée, le chatbot a appris de certains messages envoyés par les internautes et a lancé des propos controversés sur Twitter. Ce n’est pas forcément l’UX Design qui est remis en question, mais la technologie chatbot a certainement ses limites.
Dans tous les cas, le conversationnel ne peut se suffire à lui-même, il ne remplace pas les interfaces digitales mais s’inscrit dans une expérience globale.