DACE : la détection intelligente des défauts de trains
Un dispositif de contrôle fixe sur les voies, un tag RFID sur quelques wagons, et voilà une solution centralisée de contrôle de la circulation des trains chez SNCF Réseau et Rail Logistics Europe. Le projet DACE (détecteurs d’anomalie de charge à l’essieu) permet non seulement de vérifier le chargement des trains lors de leur passage sur les capteurs, mais permet aussi de détecter et d’identifier les défauts des roues. Objectif : repérer des trains non conformes et permettre aux entreprises ferroviaires une maintenance prédictive de leur matériel roulant.
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Par La Redaction
Le système fonctionne avec tous les types de trains, mais il est particulièrement intéressant pour les convois de fret, plus souvent soumis à des problématiques de surcharge, de déséquilibre de chargement ou de défaut de roues.
Environ 13% du trafic ferroviaire total en France provient du transport de marchandises, soit plusieurs centaines de trains par jour. En tant que gestionnaire d’infrastructure, SNCF Réseau a intérêt à surveiller la conformité des trains qui y circulent. Pourquoi ? Un train non conforme peut non seulement endommager les voies sur lesquelles il circule, mais aussi provoquer un accident dans les cas les plus graves. Pour des raisons de sécurité, il est aussi nécessaire de suivre le chargement des trains, par exemple pour vérifier que les wagons ne sont pas déséquilibrés.
Afin de détecter des trains non conformes, des stations de mesures, composées de 6 capteurs fixés sous le patin du rail sur un linéaire de 7 mètres de voie, ont été installées par SNCF Réseau. Les capteurs composés de fibre optique détectent les déformations du rail lors du passage du train et déterminent ainsi la conformité du train à partir de la charge et de l’état de chaque roue.
Depuis 2019, Romain Dupont, chef de projet innovation chez Rail Logistics Europe (entité regroupant VIIA, Naviland Cargo, Captrain, Forwardis et Fret SNCF) avec son équipe, et Stéphanie Günther, cheffe de projet surveillance des trains chez SNCF Réseau, travaillent à développer une solution pour exploiter les données de ces stations de mesures.
De onze jours de délai au quasi temps réel
Mais si les capteurs mesurent bien les données des convois, il faut croiser ces données avec le suivi des trains afin d’identifier l’entreprise ferroviaire correspondante. Cette procédure peut prendre jusqu’à 11 jours. Pour atteindre le quasi temps réel, la solution consiste à équiper au moins un wagon par convoi d’un tag RFID * qui est lu par un lecteur installé à côté de la station de mesure. L’identification se fait ainsi directement et les informations sont transmises quasi instantanément.
Cette rapidité de communication des données permet aux entités de Rail Logistics Europe de recenser les défauts des wagons de fret (roues, essieux, équilibre du chargement, tonnage…) grâce à une interface dynamique, et aussi de développer progressivement une maintenance préventive puis prédictive. Pour SNCF Réseau, l’intérêt est de prévenir bien à l’avance son client fret que certains défauts mineurs sont présents sur le wagon via des échanges de données informatisées, pour que celui-ci les corrige en amont et contribue à la préservation de l’intégrité du réseau.
Les premières tentatives pour pouvoir assurer une maintenance prédictive à partir des données, menées par Rail Logistics Europe avec une entreprise extérieure n’ont pas encore permis de trouver un algorithme modélisant l’évolution de défauts. Cela est principalement dû à une base de données ayant un trop faible nombre d’essieux présentant des défauts sur l’année 2021.
*La Radio Frequency Identification (RFID) permet de véhiculer des données, de les mémoriser et de les récupérer à distance grâce aux ondes radio.
Une situation gagnant-gagnant pour SNCF Réseau et les transporteurs
Dans un premier temps, les DACE fonctionnent en mode d’avertissement simple : les données transmises lors du passage du train permettent à l’entreprise ferroviaire concernée (dont le matériel roulant est équipé de tags RFID), d’agir sur d’éventuels défauts. Dans une seconde phase, le train détecté portant un défaut qualifié majeur sera arrêté sur une voie de garage pour des raisons de sécurité afin de ne pas risquer d’endommager davantage le réseau ou le matériel roulant et ainsi prévenir tous les incidents de nature à fragiliser la sécurité ferroviaire. Cette seconde phase s’inscrit dans la stratégie de SNCF Réseau d’automatiser la STEM (surveillance des trains en marche), pilotée par le programme Surveillance & Supervision de la direction générale Opérations & Production.
Mais l’objectif premier est avant tout de réussir à travailler avec les transporteurs en amont pour éviter tout arrêt de train grâce aux avertissements précoces des DACE et à la maintenance prédictive. « Le but n’est pas d’ennuyer les entreprises ferroviaires, mais d’arriver à une situation gagnant-gagnant. Si les convois sont dans un bon état, c’est avantageux pour le transporteur et pour le gestionnaire d’infrastructure » explique Stéphanie Günther.
Ce type de dispositif est en train de se généraliser en Europe, où la plupart des gestionnaires d’infrastructure ont déjà équipé leur réseau. Pour les entreprises ferroviaires, s’ensuivront très certainement une nécessité de normalisation à l’échelle européenne, pour ne pas prendre de retard aux frontières.
Photo de couverture : Sergey Lapunin