Interview de Sébastien Kaiser – “Le monde du ferroviaire va profondément changer d’ici 2020”
Fournir le haut débit mobile sur l’ensemble du réseau ferroviaire national et ce, pour nos clients comme nos agents ? Un défi en passe de devenir réalité. Directeur de programme Digital, Sébastien Kaiser fait le point sur l’ambitieux projet NET.SNCF. D’ores et déjà, 2017 s’annonce comme une année charnière.
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Par La Redaction
Emmanuelle Saudeau : Sur quelles bases le projet NET.SNCF s’est-il construit ?
Sébastien Kaiser : En tant qu’entreprise de transport au rayonnement international, il était temps que nos agents travaillent dans de meilleures conditions. Or, le prérequis indispensable à toute digitalisation est la connectivité : un programme qui doit bénéficier autant aux cheminots qu’aux clients. Comme SNCF, jusqu’à preuve du contraire, n’est pas un opérateur télécom, il a fallu donc le faire entendre. Dit autrement, la responsabilité de la connectivité devait être partagée avec les quatre opérateurs et le régulateur, l’ARCEP. Dès 2015, nous avons donc engagé des démarches en ce sens et un diagnostic concernant la qualité d’expérience utilisateur dans nos trains a été effectué. Le résultat, publié en 2016, était sans appel : le taux de couverture moyen sur nos lignes ne dépassait pas les 60%. Un résultat notoirement insuffisant…
E.S. : Dans le cadre du programme NET.SNCF, la promesse de départ était donc celle-là : pas de digital sans connectivité et par conséquent, du haut débit pour tous. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Le projet NET.SNCF doit vraiment être appréhendé comme un projet collectif au sein du groupe. Ainsi, notre premier objectif fut d’accompagner les opérateurs dans les différents déploiements, notamment ceux effectués dans nos tunnels. Entre 2015 et 2016, nous avons mis en place une gouvernance transversale incarnée par une nouvelle direction au sein de SNCF Réseau : la direction des Réseaux Mobiles Publics (RMP), avec à sa tête Nicolas Cussac. Ce dispositif inédit nous a permis de proposer des offres d’installation aux opérateurs sur toutes nos emprises, ce qui a rapidement amélioré notre couverture. A titre d’exemple, à la fin 2017, nous aurons couvert les 17 kilomètres de tunnel du RER C.
Soit, tout du long, une réception en 3G et 4G et chez les quatre opérateurs. De même, une vingtaine de gares d’Ile-de-France sont d’ores et déjà identifiées pour des prochains travaux qui prendront fin en 2018. Tout ça est en très bonne voie ! Même si l’équilibre entre timing et investissement n’est pas toujours évident à trouver.
E.S. : D’un point de vue organisationnel, nous sommes ainsi parvenus à industrialiser la manière de traiter cette question cruciale…
S.K. : Et dans la foulée, nous avons aussi réglé les aspects financiers, juridiques, immobiliers et de sécurité. Une démarche globale qui n’a été possible que grâce au concours de l’ensemble des acteurs SNCF. Et c’est une fierté. Ce premier gros palier franchi, nous pouvons désormais nous pencher sur les mesures obtenues avec l’ARCEP. Et en 2017, nous allons vraiment accélérer le rythme : de grandes campagnes nationales vont être menées et seront publiées en open data. A ce titre, notre partenariat avec Deutsche Bahn (DB) joue aussi un grand rôle, dans la mesure où les Allemands sont confrontés au même défi que nous. Sur un plan européen, l’idée est donc d’aboutir conjointement
à un standard de protocole de mesures et de publications de résultats minimum, ce qui permettrait de bien mieux défendre nos intérêts auprès des opérateurs comme des instances européennes. Une réelle prise en compte des besoins du ferroviaire est plus que nécessaire.
E.S. : L’objectif des 90% de voyageurs et d’agents SNCF bénéficiant d’une couverture haut débit est-il toujours envisageable à l’horizon 2019-2020 ?
S.K. : Oui, nous nous y tiendrons. Le fort engagement des opérateurs en atteste, leurs investissements actuels sont considérables, qu’ils s’agissent des tunnels comme des abords des voies. Croyez-moi, à ce rythme-là, le monde du ferroviaire va profondément changer dans les trois années qui viennent.