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La 5G : comprendre la prochaine génération des réseaux télécoms

De l’ultra-haut débit au quasi-temps réel, en passant par la convergence fixe-mobile… Dans les années à venir, les sauts technologiques relatifs à la 5G promettent une transformation radicale, non seulement dans le secteur des télécoms, mais aussi dans d’autres domaines comme le transport et la ville intelligente.

Publié le

Par La Redaction

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À peine le temps de célébrer la victoire des Bleus en finale de Coupe du Monde, et voilà que les Français se lancent dans la course à la 5G : le lundi 16 juillet 2018, le gouvernement français a dévoilé une feuille de route détaillant les axes paritaires. « Dès 2020, les fréquences seront attribuées _[aux opérateurs, ndlr]_ et les déploiements commerciaux devront concerner au moins une grande ville », ont déclaré Delphine Gény-Stephann, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, et Mounir Mahjoubi, Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du Numérique. Ils ont également souligné « qu’en 2025, les axes de transports principaux seront couverts en 5G ».

L’infrastructure et le réseau de télécommunication sont des piliers indispensables au développement des projets numériques. La France entend devenir une véritable terre d’accueil des startups les plus innovantes du monde, à travers les tests puis le futur déploiement de la 5G, cette dernière représentant bien plus qu’une modernisation des réseaux mobiles.

Qu’est-ce que la 5G ?

La 5G apporte simultanément des changements majeurs dans plusieurs technologies et normes, qui mises bout à bout, représentent une révolution.

Tout d’abord, elle utilisera les ondes millimétriques (ondes dont la fréquence est supérieure à 6Ghz), ce qui garantira des débits de communication jusqu’à 10Gbps. Sur un temps donné et dans un milieu homogène, plus la longueur d’onde est courte, plus la fréquence est élevée, et plus le débit du réseau est grand. Les bandes de fréquences allouées seront également plus importantes ; L’ITU, l’agence des Nations Unies pour le développement des technologies de l’information et de la communication, a fait savoir via son rapport que les débits théoriques de la 5G se hisseront à 20 Gbps (10 Gbps en montant par station de base), ce qui est vingt fois supérieurs au débit de la 4G. En revanche, la 5G ne pourra pas être véhiculée complètement par les bandes millimétriques, qui sont très sensibles aux perturbations et aux obstacles, ce qui rend délicat leur usage pour une couverture étendue, notamment dans les zones les moins peuplées. Ainsi, la 5G devra comprendre une bande « cœur », où la qualité de service (avec une fréquence inférieure à 6 GHz) est optimale, à savoir que les bandes utilisées par la 2G, 3G et 4G seront progressivement utilisées par la 5G.

Le temps de latence en 5G passera en dessous de 10 ms. Ce qui est crucial pour toutes les applications qui ont besoin d’un temps de réaction très faible  entre l’émission d’une commande et la réception à distance de cette commande, comme un robot industriel à distance, ou la chirurgie à distance. Par ailleurs, la 5G rendra possible les échanges de signaux jusqu’à 500 km/h grâce aux techniques de beam forming et beam tracking (voir vidéo ci-dessous dans l’article), qui permettent aux antennes de suivre de manière précises des objets ou utilisateurs.

Une autre technologie est également caractéristique de la 5G : le Massive MIMO (Multiple-Input Multiple-Output). Au lieu de mettre en place une seule antenne réceptrice émettrice, le Massive MIMO combine plusieurs antennes à la fois émettrices et/ou réceptrices afin de renforcer le signal et réduire les interférences.

La 5G permettra le déploiement d’un nombre d’objets connectés sans précédent. Selon les prévisions de Cisco, en 2020, chaque individu en disposera 6,58, ce qui signifiera un nombre total d’environ 50 milliards d’objets connectés en total pour l’ensemble de la population mondiale. Et la virtualisation et « softwerisation » des réseaux télécoms permet le « network slicing » – le fait de créer simultanément des tranches du réseau dédiées à des usages spécifiques : très haut débit grand public, connexion d’un grand nombre d’objets…

Sébastien Kaiser, Directeur Connectivité & Réseaux explique les techniques phares de la 5G ainsi :

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Les réseaux mobiles : voyage dans le temps

On l’aura compris, la 5G n’a plus grand-chose à voir avec les précédentes générations de réseau d’accès à internet mobile. Mais comment en est-on arrivé là ?

La 2G est née en 1991 en Finlande. C’est une grande étape pour le secteur des télécoms, pour passer de la transmissions de l’audio analogique (AMPS) vers une technologie numériqueGSM. Il est alors possible de seulement de passer des appels téléphoniques, avec une gestion des interfaces radio plus dynamiques avec un mobile. Les écrans couleur apparaissent, comme pour la première génération d’iPhone. Néanmoins, la vitesse de transmission des données sur le réseau reste assez limitée (10 Kbit/s). Aujourd’hui, plusieurs opérateurs télécoms ont décidé de retirer leur service 2G, au profit des réseaux plus récents et performants.

Durant les années 2000, le développement de la technologie UMTS fait émerger la 3G. Les taux de transmission de données atteignent environ 400 kbps (21 à 42 Mbps pour la 3G+). L’appel vidéo et l’accès à l’internet haut-débit commencent à devenirune réalité. Le 3GPP (3rd Generation Partnership Project), créé à l’initiative des américains Nortel Networks et AT&T à cette période-là, pose le cadre des normes 3G, 4G et 5G en produisant et publiant leurs spécifications techniques. Alors que la 3G est encore opérationnelle dans la plupart des smartphones, la 4G prend déjà une place significative sur le marché.

Et pour cause, elle est beaucoup plus performante : la technologie LTE) est capable d’offrir une vitesse allant à 150 Mbps, soit environ 375 fois la vitesse de la 3G. À la différence de la 5G, la bande passante est ici partagée entre les terminaux des utilisateurs. Ainsi, les débits réels varient de 10 à 80 Mbps, selon le nombre d’utilisateurs et les devices utilisés.

Wi-Fi

Le « Wireless LAN », ou Wi-Fi, est un ensemble de protocoles normalisés depuis 1997 qui rend possible la communication de données par ondes radio. C’est un réseau sans fil local qui dépend d’un matériel – une box chez les particuliers par exemple –. La portée d’un Wi-Fi varie de 20 à 50 mètres en intérieur, ou à plus de 100 mètres en environnement ouvert – comme sur les quais d’une gare –. Que ce soit sur un téléphone mobile, une tablette ou un PC, la connexion au réseau Wi-Fi est simple, mais reste parfois peu sécurisée. Les éléments métalliques réduisent assez fortement la propagation des ondes et diminuent ainsi la performance du réseau. Le Wi-Fi est parfois victime de son succès avec un trop grand nombre d’équipements accédant au service dans une même zone, sans compter tous les appareils qui utilisent les bandes Wi-Fi (2,4 & 5Ghz), libres d’usages, ce qui peut être cause d’interférences.

La 5G, quant à elle, couvrira non seulement ces technologies, mais aussi en grande partie celles utilisées dans les réseaux IoT comme Sigfox et LoRa, le Bluetooth ou le NFC, qui disposent de longueur d’ondes toutes différentes, et ne sont compatibles qu’avec certains équipements.

La 5G dans le monde

Avec un tel potentiel, la 5G devient une actualité brulante. Depuis 2014, les annonces venant des constructeurs de composants électroniques (dont Qualcomm) et de smartphones, des équipementiers télécoms (dont Nokia, Ercisson, Huawei, Samsung), des opérateurs, des régulateurs et des politiques se multiplient. Cette année-là est notamment marquée par l’accord historique de l’UE et la Corée du Sud autour du développement de la 5G. Depuis, les sud-coréens s’imposent parmi les leaders sur le sujet. Après avoir dévoilé quelques maquettes des technologies 5G (MEC, fréquence millimétrique, etc.){target=_blank} au MWC Barcelone 2016, le géant sud-coréen KT Telecom a réalisé, à l’occasion des Jeux Olympiques d’hiver de PyeongChang, des tests 5G grandeur nature qui ont permis aux spectateurs de vivre les premières expériences 5G immersives du monde.

De leur côté, Japon et Chine emboitent le pas de leur voisin. NTT DoCoMo, l’opérateur nippon numéro un a réalisé, dès 2016, la diffusion temps réel de vidéos 8K avec un réseau sans fil 5G, avec Nokia ; tandis que SoftBank, le conglomérat japonais de la tech, imagine déjà des usages de la technique Massive MIMO en 5G, allant de l’IoT, à la conduite autonome, en passant par les réalités augmentée, virtuelle et mixte. La mémoire de l’inauguration du Shinkansen durant les Jeux Olympiques de 1964 étant encore fraîche, les applications plus poussées de la 5G sont attendues pour les JO de 2020 à Tokyo. En Chine, les équipementiers et opérateurs locaux tels que Huawei, ZTE ou China Mobile se sont alliés afin de réaliser des tests IODT (Interoperability and developpement testing), dans l’optique de la mise en marche d’un système commercial 5G de bout en bout, et surtout conforme aux standards fixés par la 3GPP.

Outre-Atlantique, le jeu se joue entre trois acteurs majeurs : AT&T, Verizon, et New T Mobile. Si le géant AT&T a souhaité occuper le terrain médiatique en lançant sa « pseudo 5G » (ladite « 5G Evolution »), qui, en réalité, est basée sur un cœur de réseau 4G, Verizon a prévu une offre commerciale de la 5G fixe de type 4G box, dans les résidences, pour quelques villes américaines. Le New T Mobile (fusion de T Mobile avec Sprint en avril 2018, avec pour objectif de remporter la bataille de la 5G sur le sol américain) prépare la sortie de sa 5G courant 2019, puis un déploiement national en 2020.

Si l’on en croit la feuille de route du gouvernement français, le calendrier de 2020 des asiatiques et nord-américains correspond seulement à la date de l’attribution des fréquences dans l’Hexagone. En réalité, les premiers tests en France ont débuté assez tôt, en 2015, et plusieurs collectivités et opérateurs s’y sont lancés. Néanmoins, sur le marché grand public, les Français ont jusque-là préféré améliorer la performance de la 4G (et 4G+).

Au niveau réglementaire (la puissance de rayonnement par exemple), le Japon et la Corée n’ont pas les mêmes contraintes que la France. Durant la _learning expedition_ des équipes SNCF, les spécialistes du groupe ferroviaire ont pu constater une densité incroyable des antennes radio (par exemple, 445 000 BTS en Corée du Sud, soit 25 fois plus qu’en France !). « En plein centre de Séoul, les antennes débordent des toits des immeubles à seulement quelques mètres du sol, le long de l’autoroute, même à hauteur de voiture », ont-ils fait savoir. L’éventuelle pollution des ondes radios reste pourtant un sujet à ne pas ignorer dans le déploiement de cette technologie.

Sébastien Soriano, le président de l’Arcep (l’Autorité de régulation chargée de réguler les communications électroniques en France), considère que « le secteur des télécoms _[français, ndlr] _peut et doit conduire de front à un déploiement ambitieux de la 5G et un rattrapage de la 4G ». Bref, la feuille de route désigne désormais quatre chantiers 5G en France :

Libérer et attribuer les fréquences radioélectriques pour les réseaux 5G. À cet effet, une consultation publique sera lancée par l’Arcep en octobre 2018.

Favoriser le développement de nouveaux usages. Les autorités locales, opérateurs, équipementiers et autres acteurs seront tous impliqués.  

Accompagner le déploiement des infrastructures de la 5G. L’Arcep envisage d’évaluer la possibilité du partage de réseaux s’agissant des « small cells ».

Assurer la transparence et le dialogue sur les déploiements de la 5G et l’exposition du public.

Quelques enjeux stratégiques de la 5G

La 5G permet de délivrer trois promesses principales que sont le très haut débit, la très faible latence et une grande densité de connexions simultanées : on pourra imaginer le téléchargement d’un film HD en déplacement via un réseau 5G qui prendra moins de temps que lire cette phrase. Mais à l’heure où l’on se contente de regarder nos séries sur Netflix et YouTube en 4G, pourquoi est-il intéressant de mettre en place la 5G ?

En réalité, avec la démocratisation des productions audiovisuelles 4K et 8K, la réalité virtuelle HD, les jeux UHD et autres contenus streaming hébergés à distance – souvent dans le cloud –, le très haut débit devient un besoin imminent. Les usages sont déjà validés au travers des tests aux JO d’hiver en Corée du Sud ou encore au Japon. La connectivité est également au cœur du développement des voitures autonomes. Pour des questions de sécurité, celles-ci devront pouvoir à la fois détecter tous les signaux et obstacles, comme les panneaux de signalisation ou la présence d’une personne (au-delà de 250 mètres pour ladite « perception étendue »),

mais aussi communiquer avec l’infrastructure et les autres véhicules, le tout en temps réel, et donc, avec une connectivité de très faible latence. Pendant que les constructeurs automobiles élaborent des capteurs de haut vol et entraînent les algorithmes intelligents qui feront fonctionner l’architecture informatique du système, la 5G devient finalement le « carburant » des futures voitures.

La même logique s’applique dans le secteur de l’IoT. Chez SNCF, par exemple, plus de 5 000 capteurs sont installés dans les trains, les Technicentres Industriels (les établissements de maintenance du Matériel) et le long des voies ferrées. Les objets deviennent ainsi communicants : les toilettes d’un train peuvent désormais alerter les agents quand leurs réservoirs d’eau ne sont pas suffisamment remplis, ce qui améliore l’expérience des voyageurs.

Demain, la 5G pourra, grâce au network slicing, garantir une connectivité dédiée aux usages ferroviaires, en parallèle des usages des passagers, et ainsi, permettre de connecter davantage d’éléments fonctionnels de l’écosystème. Le concept de Smart City, s’appuyant fortement sur un système IoT, devra aussi pouvoir prendre son plein essor grâce à une meilleure capacité de connectivité.

Certes, les enjeux et potentialités de la 5G sont avant tout industriels, mais les ruptures technologiques qu’elle va apporter auront bien un impact sur le quotidien du grand public. À ce titre, certains s’interrogent sur la problématique d’accessibilité : la 5G serait-elle une technologie qui contribuera à aggraver la fracture numérique entre les différentes populations ? Une solution est néanmoins envisageable : favoriser le développement de la 5G dans les territoires au maillage des infrastructures télécoms les moins développées. Les gouvernements vont devoir réfléchir sur la question.   

L’efficacité énergétique de la 5G devra être optimisée car la technique de Massive MIMO est basée sur une « focalisation des communications ». Plutôt que de faire émettre les ondes dans toutes les directions depuis une antenne – c’est le cas de la 4G, et l’émission des ondes consomme de l’énergie –, les petites antennes 5G ne les envoient qu’au terminal qui entre dans le champ à sa portée, comme un train connecté. 

Facilitateur graphique – Vincent Albert

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