SNCF à Convergence – Penser le train de demain
Le train fait face à une concurrence de plus en plus protéiforme. A l’occasion du salon Convergence, Pascal Desaunay, directeur du programme « TGV 2020 » présente l’état de l’art.
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Par La Redaction
Jeudi 9 décembre 2016, professionnels et curieux sont venus nombreux écouter les participants du salon Convergence débattre autour d’un sujet très attendu : “comment monter à bord du train du futur ?”. Une question forte enjoignant de nombreux challenges. Autour de l’animateur se trouvait Pascal Desaunay, le directeur du programme TGV 2020, ainsi que plusieurs partenaires et fournisseurs officiels des réseaux ferroviaires.
Concurrence accrue
« Le cadre de SNCF se retrouve aujourd’hui face à deux problématiques intimement liées : la compétitivité et l’attractivité ». Pascal Desaunay commence sa démonstration en évoquant le renouvellement des parcs. En effet, les trains ont une durée de vie fixe et doivent être remplacés régulièrement : “Avant, c’était moins grave d’acheter cher un train, au vu de l’argent remporté” explique-t-il. Aujourd’hui, les bénéfices de SNCF ne sont plus les mêmes et l’économie du transport a considérablement évolué. “Il y a dix ans, on considérait que la Deutsche Bahn était un concurrent, mais on se rend compte qu’en réalité nos compétiteurs ne sont pas les transporteurs ferroviaires (lire l’article sur Meetup DB SNCF). Non, ce sont les bus, Blablacar et autres Easy Jet”.
Moins de coûts pour plus d’attractivité
Afin de lutter contre ces nouveaux concurrents, le premier objectif de SNCF est la réduction des coûts. “Nous n’avons pas d’autre choix que de tuer les dépenses inutiles. En plus d’augmenter le nombre de sièges, il faut baisser le coût d’acquisition des trains de 20%, celui de la maintenance de 30%, et celui de l’énergie de 20%”, assène Pascal Desaunay, avant de poursuivre : “Mais cela ne fait pas tout. Comme je l’ai expliqué, nous sommes confrontés à un vrai problème d’attractivité. Longtemps le TGV était le plus beau train technique du monde ; mais ce que les gens veulent avant tout c’est un service. Des toilettes propres, une clim qui marche, des lumières tamisées. Mon souci, c’est de redonner aux gens l’envie de prendre le train, en le rendant à la fois plus moderne et plus convivial”.
Pour séduire l’utilisateur, le dirigeant évoque une baisse substantielle du prix du billet et l’amélioration de l’expérience des usagers. “En Espagne, le Talgo AVRIL vient de gagner l’appel d’offre face à Alstom et Siemens à cause du wifi” rapporte Philippe Javaux, le directeur commercial de Borflex – entreprise productrice de joints en caoutchouc collaborant régulièrement avec SNCF dans le cadre de la construction des vitres ou des portes -. “On se regarde ! Il y a cinq ou six ans on se disait ‘le wifi, pourquoi ?’ Maintenant on regrette”, constate-il. A ses côtés, Philippe Desaunay acquiesce : “Ils ont même un wagon garderie. Nous réfléchissons beaucoup à ce sujet. Demain il risque d’y avoir de nouvelles choses, des surprises, pas forcément ce que les gens attendent”.
Changement de paradigme
Outre ces défis, le véritable enseignement de la conférence aura été le changement d’approche par SNCF. Fini les cahiers de charges de 3 000 pages à destination des fournisseurs, place à l’humilité et à la collégialité dans les projets. “Ce changement de posture n’a pas été simple” assure Pascal Desaunay. Le nouveau mode opératoire est peu ou prou le même que celui de la Silicon Valley : “Maintenant, on est plus à l’écoute de nos fournisseurs. Je suis assis tous les jours à côté du directeur de programme 2020 d’Alstom. Depuis le début de notre collaboration, au lieu de s’envoyer 26 000 courriers comme sur un projet classique, on s’en est envoyés deux”. Philippe Javaux confirme, en multipliant les exemples concrets à propos des joints : “Le collaboratif est essentiel ! On demande à la chaîne de fabricants de ne pas se contenter d’être des faiseurs, mais de devenir force de proposition”. De quoi créer un écosystème bénéfique pour tout le monde.
La conférence s’est finalement conclue sur une note enjouée et rêveuse. “Même si nous sommes sur des sables mouvants, nous réfléchissons déjà à ce que pourrait être le train en 2070. C’est passionnant. En interrogeant les jeunes dans les écoles, on se rend compte que leur principal sujet de préoccupation sont les bagages ! Ils en ont marre de devoir les porter. On réfléchit donc aux moyens de développer une mobilité totale, notamment en déployant des services porte-à-porte ou dernier kilomètre”. Entre uniformisation de la cyber-sécurité et équipements connectés qui permettront de prévenir les pannes, Pascal Desaunay a fait rêver la foule. Une question émane dans le public, à propos du rôle des contrôleurs. “Leur métier est également amené à évoluer avec le digital. Peut-être aurons-nous développé un système qui permettra de savoir si vous avez un billet au moment de vous asseoir. On pourrait imaginer un petit voyant rouge qui s’allume, ou bien une décharge électrique qui vous empêchera de prendre place. On hésite encore” a-t-il humoristiquement conclu, sous les rires et les applaudissements.
_Photo de Une : Médiathèque SNCF_