5 questions à Henri Pidault : « Faire du digital un levier de performance pour l’entreprise »
Chief Performance Officer de SNCF depuis mai 2017, Henri Pidault est diplômé en Physique de l’Ecole Normale Supérieure. Ce passionné d’informatique code depuis l’âge de 13 ans, il développait alors des jeux vidéo pour en faire profiter ses amis. Aujourd’hui véritable clef de voûte de l’industrialisation des projets digitaux du groupe ferroviaire, il revient sur sa mission, sa vision, et ce qui est avant tout sa vocation : « la transformation digitale comme vecteur de création de valeur et de réduction des coûts ».
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Par La Redaction
Qu’est-ce qui vous a donné envie de rejoindre SNCF en tant que CPO du groupe ?
Après de nombreuses années d’expérience à des postes de DSI dans le secteur privé international, je souhaitais intégrer une entreprise française fortement implantée dans nos territoires. J’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour le groupe SNCF car il jouit d’une conjoncture unique : c’est un grand groupe industriel en contact direct avec le grand public. Cette admiration est d’ailleurs grandissante depuis que j’ai intégré les rangs de l’entreprise. Je n’avais pas connaissance de toute la teneur de ses activités à l’international par exemple : ce fut donc une très belle surprise que d’apprendre que 30% du chiffre d’affaire du groupe était fait à l’étranger, chiffre voué à croître selon Guillaume Pepy (qui annonçait lors de sa dernière prise de parole publique qu’il atteindrait les 50% d’ici 2020).
Pourriez-vous expliquer ce qu’est le rôle du CPO ?
Le rôle du CPO est de faire du digital un levier de performance pour l’entreprise. Il doit évaluer les actions, mesurer la création de valeur pour la société selon des indicateurs déjà mesurés par les métiers autour des thèmes de l’excellence opérationnelle, la prévention du risque, l’augmentation du chiffre d’affaires ou encore l’amélioration du quotidien pour les voyageurs et le personnel SNCF. A titre d’exemple, on peut considérer l’usage de l’IoT ou la maintenance prédictive comme des leviers de performance opérationnelle.
Le CPO veille aussi à la réduction des coûts d’exploitation par le numérique. On parle là de coûts informatiques, mais aussi de l’impact des coûts d’exploitation autour de l’industrie 4.0, cette fameuse « 4ème révolution industrielle ». Pour l’informatique, il s’agit par exemple d’harmoniser le patrimoine applicatif : c’est-à-dire d’arriver à faire plus avec moins de logiciels.
Vous avez annoncé dernièrement, lors du 86ème Tchat Digital, que le groupe est arrivé à une première étape de maturité dans sa transformation digitale. Quelle en est la prochaine étape ?
Il y a trois ans, Guillaume Pepy lançait le programme “Digital Pour Tous”. Aujourd’hui, je suis impressionné par le degré d’appropriation du réseau social d’entreprise qui forme une communauté toujours plus grande de plus de 60 000 personnes. Cette communauté échange et s’entraide en permanence sur des gestes métiers et pour partager des connaissances ; une intelligence collective se matérialise et les silos se brisent. Le prochain défi consiste à revisiter les processus métiers au travers du prisme de nos nouveaux outils collaboratifs Office365 en mobilité. La facilité d’usage doit permettre une appropriation de ces outils à tous les niveaux de l’entreprise. Cela donnera alors une nouvelle force économique au groupe SNCF : nous pourrons dé-commissionner beaucoup d’applications spécifiques au profit d’une plateforme technologies accessible à tous, et pourquoi pas même en finir avec le format papier pour passer définitivement aux processus digitaux.
Où en est le groupe au niveau de l’industrialisation des innovations numériques ?
Nous sommes au début de cette démarche. Pour cela, il faut s’assurer que l’ensemble des acteurs à même de généraliser ces innovations se les approprient. Ces dernières naissent à travers tout le territoire et une de mes attributions sera de promouvoir les meilleurs initiatives, d’être un passeur d’idées et un animateur du réseau.
Mesurer l’avancée de l’industrialisation des projets digitaux prendra du temps. Je travaille actuellement sur un référentiel – une « digital value map » – qui permettra de mesurer l’avancement de la création de valeur par le numérique. L’objectif est d’identifier les indicateurs métiers déjà existants, concrets et éprouvés puis d’en sélectionner les 50 plus emblématiques (qui matérialisent le mieux les enjeux stratégiques de l’entreprise). Je veux pouvoir, à chaque fois que l’on met en production une initiative digitale, en évaluer l’impact. L’enjeu est de focaliser l’énergie humaine et financière de l’entreprise sur les projets qui créent le maximum de valeur. C’est ainsi que l’on rentrera dans une démarche positive, un cercle vertueux pour une entreprise agile.
Quand vous vous êtes adressé aux collaborateurs de la team e.SNCF, vous êtes revenu sur le sujet de l'industrie 4.0. Comment cette dynamique de transformation permettra à SNCF de devenir le leader de cette nouvelle industrie ?
Dans l’ordre chronologique, les différentes révolutions industrielles ont été : le développement de la machine à vapeur et de la mécanisation, l’électricité, et enfin l’automatisation. On peut constater que le chemin de fer a toujours suivi ces évolutions industrielles. Aujourd’hui, les thématiques de l’industrie 4.0 sont d’ores et déjà portées par les Fabs SNCF, mais aussi dans les métiers, avec chaque jour de nouvelles innovations émergeant du terrain. Mes expériences passées dans d’autres grands groupes industriels me permettent d’affirmer que SNCF n’est pas en retard dans cette révolution, bien au contraire : le groupe fait déjà partie des leaders.
L’entreprise s’améliore en continu ; la mesure de ces améliorations nous permettra de concentrer nos moyens pour continuer d’accélérer notre transformation digitale et soutenir cette dynamique d’intelligence collective.